Balades historiques

LA VILLA CAVROIS : UN BIJOU DES ANNÉES 30

La Villa Cavrois, dessinée par Rob Mallet-Stevens, a rouvert ses portes à Croix (Nord). Ce chef d’œuvre architectural des années 30 mérite une balade historique.


C’était un chef d’œuvre en ruine, pillé, vandalisé entre 1980 et 2000. Après une rénovation à 23 millions d’euros et l’intervention de dix-huit corps de métiers, c’est un bijou unique, modelé en 1932 qui ouvre ses portes au public. La villa Cavrois porte le nom du riche industriel nordiste qui l’a commandée en 1929. Tout comme la villa Noailles, située à Hyères qui porte le nom de sa mécène. Les deux chefs d’œuvres datent du début des années 30, mais l’édification de la villa varoise, une résidence d’été habitée dès 1925 dans une première version sans extension, précède celle de la villa de Croix, une vaste maison de famille.


En venant de la gare de Lille, par le tramway, autre vestige modernisé, il faut environ vingt minutes pour arriver dans le lotissement qui abrite les 1 840 m2 de surface habitable de cette splendeur. Évidemment, la maison est imposante, en osmose totale avec les principes de construction qui ont fait de Robert Mallet-Stevens, avec Le Corbusier, un des grands architectes modernes, mais ce n’est pas son seul atout.

3 bonnes raisons de visiter la Villa Cavrois :

1 - Elle détonne 
Une fois passé le seuil de la maison du gardien, devenue librairie-boutique, la perfection des volumes et de lignes repose l’œil. Elle n’est pas blanche, ni même en briques rouges, ce sont bien des briques jaune safran qui la parent. Robert Mallet-Stevens, surnommé Rob, détestait l’architecture régionaliste, à la mode chez les petits barons locaux. Ce visionnaire et son commanditaire nous ont épargné une sucrerie kitsch de plus, pour valoriser les matériaux les plus modernes. Mais la distribution des pièces n’est pas si éloignée de celle d’un château, avec notamment des espaces de domesticité et un jardin rond, placé devant, pour faire circuler … les voitures des chauffeurs.



2 - Elle est vraiment rare
Le bâtisseur a peu construit. C’est aussi un manifeste puisque c’est l’œuvre la plus complète et la dernière commande privée d’envergure de l’architecte. Le jardin, les matériaux, le sous-sol, la piscine, nous font plonger dans sa vision totale, hygiéniste, et jusqu’au boutiste, y compris dans les couleurs. Comme le dit l’architecte Richard Klein dans l’excellent ouvrage « La villa Cavrois » (Editions du patrimoine, 12 euros), « Mallet-Stevens met en œuvre une polychromie originale et illusionniste faite de nuances, de légères variations et de citations. » Les offices et les salles de bains sont en simples carrelages de damiers noir et blanc, la salle de jeux des enfants est en toile cirée rouge, le salon est vert. Les éclairages sont souvent indirects ou délivrés par des boites à lumières, un procédé utilisé par Mallet-Stevens quand il décorait des boutiques.




3 - Elle a été beaucoup copiée
Les décorateurs des palaces du monde entier ont copié, parfois de façon littérale, le style Mallet-Stevens, qui fût aussi un grand décorateur de films. L’original est bien sûr nettement plus beau que les pâles et fainéantes copies.