Dans le Nord de la France, à Croix, à proximité du parc Barbieux, au niveau de la plaine de Beaumont, se trouve une superbe réalisation architecturale. La propriété vient d'intégrer le réseau mondial des Iconic Houses, qui rassemble les 200 édifices les plus importants en matière d’architecture dans le monde.


La Villa Cavrois, édifiée de 1929 à 1932 par l'architecte Robert Mallet-Stevens demeure une référence internationale dans l'histoire de l'architecture. Au sein du mouvement moderne, elle constitue un exemple singulier sur le rapport entre architecture et décor. Construite en béton, elle est entièrement recouverte d'un parement de briques jaunes de 26 modèles différents. 






Elle possède des équipements à la pointe de la modernité avec une sonorisation par TSF dans toutes les pièces, des horloges synchronisées et un système complet de téléphonie. La villa possède une salle de cinéma, une station service, une bagagerie, etc. Elle devait répondre à un programme dans l'air du temps : " air, lumière, travail, sport, hygiène, confort et économie ". En fait de villa, c'était une sorte de palais de près de 2 500 m2, pour lequel l'architecte imagina une impeccable sobriété du décor et une organisation stricte de l'espace : d'un côté, les appartements des parents et les pièces de réception, de l'autre, les pièces réservées aux domestiques et aux enfants.


En 1986, après la mort de Madame Cavrois, la villa est cédée à une société civile immobilière qui projette le lotissement du parc. Après une instance de classement prononcée le 9 décembre de la même année, un classement d'office est décrété en 1990.


Photo Association Eugénies Jacques Desbarbieux © Fond d'écran du blog

Des désaccords entre l'État et le nouveau propriétaire promoteur Jean-Pierre Willot, sur le devenir de la villa et sur le parti de restauration à choisir, conduit à un affrontement juridique. Pendant ce temps, le travail de dégradation réduit la villa à un état proche de la ruine : abandonnée, elle est offerte au vandalisme, au pillage et le béton présente de graves signes d'altération. En 1998, les coûts de restauration sont estimés à 38,5 millions de francs. A partir de 1990, l'État finira par entreprendre, dans l'urgence et à ses frais, des travaux minimum de sauvetage.

Un accord interviendra avec les propriétaires en échange d'une partie du terrain. La superficie du parc de la Villa Cavrois sera amputée notamment du potager qui sera loti de 5 habitations.

L'association de sauvegarde (ASVC) qui mènera parallèlement des actions de sensibilisation auprès de l'administration et du public, afin que l'amnésie ne recouvre pas le sort de cette œuvre remarquable de l'architecture du XXe siècle, se voit récompensée de ses efforts avec une ouverture au public annoncée pour 2015. La Villa Cavrois faisant désormais partie des 100 Monuments Nationaux.



Diplômé de l’Ecole spéciale d’architecture de Paris, Mallet-Stevens s’intéresse aux arts - tous les arts ! Le septième, avec la création de décors de cinéma, et plus simplement l’art de vivre. Pendant les premières années de sa carrière, il dessine de nombreux meubles, toujours avec une longueur d’avance sur son époque.


Le designer devient ensuite un architecte visionnaire. Véritable porte-étendard du mouvement moderne, il fonde et préside l’Union des artistes modernes (UAM) en 1932. Cette même année, il inaugure la villa Cavrois, petit château avant-gardiste dans lequel il exprime tout son art, dans l’intégralité de la réalisation. Il en conçoit non seulement l’architecture, mais imagine aussi le jardin et l’intérieur des pièces, avec un mobilier unique et des aménagements considérés futuristes pour l’époque...



Une demeure luxueuse aux traits épurés



La villa est pensée pour être avant tout confortable et lumineuse. Les pièces familiales s’ouvrent sur de grandes terrasses reliées au parc. Dans l’aile réservée aux parents, la chambre recèle, dans un camaïeu de beiges, des meubles en palmier naturel verni, dont une table cachant un casier secret, et des fauteuils en satin blanc. La salle de bains du couple est, quant à elle, pavée de marbre et, par endroits, de moquette noire et blanche.



Derrière la sobriété des traits, la demeure - dernière villa dessinée par Robert Mallet-Stevens - est d’une extrême élégance. En témoignent les matériaux nobles utilisés, mais aussi les équipements, peu usuels à l’époque : accès à l’eau chaude, froide et adoucie, appareils électroménagers, téléphone, interphone et TSF dans toutes les pièces, chauffage central, ventilation, chauffe-peignoir électrique, bref, un luxe total pour l’époque.